Cette vidéo d’environ 8mn est issue d’une audition pour un petit court-métrage. Le personnage est Théo Van Gogh qui, souffrant de troubles psychologiques, se prend pour son frère Vincent après la mort de ce dernier. Dans la scène jouée sa femme vient lui rendre visite à l’hôpital psychiatrique (ici cette réplique est donnée par l’assistant-réalisateur).
La vidéo est en 3 parties : 2 fois la scène jouée puis une improvisation (la qualité du son étant médiocre, je sous-titre l’improvisation pour plus de confort).
Je me souviens être arrivé à cette audition avec une certaine confiance en mon jeu. Il m’a semblé que je maîtrisais l’exercice et finalement les diverses prestations se sont faites sans pression tout en étant concentré. Le fait que ma « femme » soit jouée par un homme ne m’a même pas vraiment dérangé, mon imagination était en place.
Sur la première prise, le jeu me semble être « à l’image d’une première prise », c’est à dire que la concentration et l’énergie sont présents mais encore en rodage avec les parties de colère qui manquent un poil de retenu. Je m’étais imaginé un personnage très colérique. On peut voir que dans toute la partie de 1mn30 à 1mn45 je souhaite prendre le temps que l’impulsion de la colère vienne, je me souviens ne pas en avoir été loin certes, mais son expression reste finalement maladroite et forcée par rapport à la réalité de mon intériorité. Ceci doit être lissé. Je note tout de même de façon positive d’avoir voulu prendre le temps de ressentir et d’attendre une impulsion réelle avant d’invectiver mon partenaire. C’est la principale chose qui sera changée dans la deuxième scène et sur demande de mes « casteurs ». Le personnage doit resté fortement perturbé, dans sa bulle, mais moins dans la force. Il me semble effectivement que la seconde prise est meilleure et répond à la demande sur ce point là.
A l’époque de cette audition je me souviens que j’étais également dans une forte période de réflexion sur ma corporalité et la manière dont je pouvais progresser en travaillant sur mon corps au quotidien (c’est à cette période que j’ai démarré les cours de danse classique pour m’y aider). Et je me souviens que pour cette audition j’avais une réelle volonté de prendre conscience de mon corps. Alors bien sûr il s’agit ici d’un personnage « décadent », parfois prostré, mais malgré celà j’ai l’impression de maîtriser ce corps, dans mes déplacements, dans ma prise d’espace… Il eût été un temps où mon côté voûté, parfois « asymétrique », n’eût pas été une volonté d’incarnation d’un personnage mais l’expression d’un manque de précision de l’acteur. Dans le cadre de cette prestation je sais que j’ai fait l’effort d’y penser et mon corps à cette époque n’était sans doute pas encore habitué à celà et n’était pas encore parfaitement formé musculairement mais l’intention est présente et c’est déjà beaucoup. Celà se voit d’ailleurs sur les deux-trois dernières secondes de la vidéo, après l’improvisation, là je ne suis plus dans le personnage précédent et je vois que pour me diriger vers la porte j’essaie de me grandir et d’être droit ! A l’époque c’était vraiment un axe de progression important pour moi (d’ailleurs vous retrouverez un article un peu original sur la posture ici : Etre un acteur terrien, un comédien ancré dans le sol… en se soutenant par les orteils ?)
La dernière partie est une improvisation. On me demande de jouer le rôle de quelqu’un qui va voir sa femme à l’hôpital sachant qu’elle va mourir… Ok, je ne m’y attendais pas du tout. J’ai trouvé ça un peu bourrin comme demande pour une audition mais bon. Je pense que c’est relativement réussi mais soyons clair j’ai donné plus ou moins ce que je me doutais qui allait fonctionner sans forcer. Pour le coup, je n’ai pas fait dans l’engagement créatif . Rester simple, parler de façon naturelle, placer la petite touche d’émotion contenu. C’est sobre et efficace je crois mais bon au final c’est chiant non ? (Ma maman me dit que non) En même temps je vous assure que vous retrouver face à 4 mecs qui vous demandent de parler à votre femme sur le point de mourir sans le moindre appui visuel c’est pas évident ! J’ai fait ce qu’on m’a demandé et je crois avoir donné ce qu’il fallait pour être pris dans le cadre de l’audition et c’était le but. Mais pour ce qui est de la prise de risque je me suis vraiment pas foulé. Pour ce qui est des pistes de progressions personnelles j’aimerais vraiment faire disparaître ce tic de cligner des yeux dès que je suis dans une situation inconfortable, conjugué à ce sourire tendu que l’on peut voir au début de l’impro et sur les 20 premières secondes. Même dans une situation de stress il me semble clair que ces micro-mouvements faciaux sont conséquences de tensions de l’acteur et non du personnage.
Malgré tout mon état d’esprit sur cette audition m’a vraiment aidé à présenter mon travail de façon positive. J’étais en confiance, sans pression, et j’ai pris plaisir à créer ce personnage. Retrouver cette attitude sur des castings plus importants seraient sûrement très utile pour ne pas être parasité dans ma concentration et présenter au mieux ma scène. Mais ce n’est pas toujours évident. Obtenir l’opportunité d’une audition pour un rôle vraiment intéressant est quelque chose de rare et forcément ça créé toujours une petite confusion interne quand ça arrive.
A titre informatif : J’ai été pris pour cette audition. Mais on m’a ensuite laissé savoir qu’il fallait me teindre en roux et sur le moment, étant donné les conditions du tournage, ça me semblait compliqué. L’équipe a cherché un autre acteur donc. Au final le projet a été annulé et mes cheveux me remercient.