Conference de 2008 de V. Amiel : Comment le corps vient aux hommes. Jeu de l’acteur américain

« Après la génération de l’Actors Studio, puis les folles embardées d’un
Cassavetes, les acteurs américains des années 70 marquent-ils une
approche nouvelle du jeu cinématographique ? Faut-il voir dans
l’avènement d’un Nicholson, d’un de Niro, d’un Hackman une liberté
nouvelle du corps, une autre façon d’occuper le monde, ou un retour à un
certain classicisme dramatique ? « 


Voici comment est présentée la conférence de Vincent Amiel dans le cadre du cycle Dennis Hopper et le Nouvel Hollywood en 2008 à la Cinémathèque de Paris.

Image illustrative de l'article Cinémathèque française           Afficher l'image d'origine

Je vous invite à découvrir l’enregistrement de cette conférence qui m’a passionné :
http://www.canal-u.tv/video/cinematheque_francaise/comment_le_corps_vient_aux_hommes_jeux_de_l_acteur_americain_conference_de_vincent_amiel.4270

La conférence porte donc sur les acteurs du Nouvel Hollywood des années 60 et 70 avec la génération des Jack Nicholson, Dustin Hoffman, Al Pacino, Robert de Niro pour les
comédiens et John Cassavetes ou Dennis Hopper pour les cinéastes (et qui
étaient également comédiens). Plus particulièrement, V. Amiel explique comment un travail lié à la corporalité est venu s’immiscer dans leur façon de jouer (et ce au-delà des simples enseignements de l’Actors Studio)

Tout d’abord, V. Amiel constate trois évolutions dans l’industrie cinématographique de cette période induites par des comédiens qui, plus que jamais, ont le souci du « travail » et de la « performance » :

– En premier lieu s’opère une « démocratisation de l’écran » et surtout du comédien. Le comédien n’est plus sur un piedestal, il n’est plus une icône supérieure ni un idéal inateignable. Le comédien se rapproche et devient presque un alter-ego du spectateur. Dans cette nouvelle approche, le spectateur s’identifie plus facilement à des comédiens qui s’essaient à devenir les interprètes de personnages lambda, quotidiens et plus réalistes.

– Une plus grande implication et une plus grande maitrise, voire un certain pouvoir de l’acteur, sur l’oeuvre en cours de création. L’acteur n’est plus un simple outil, il obtient une véritable liberté dans ses propositions et un impact plus important dans la construction du film et de sa mise en scène. En fait, l’acteur devient même le principal pilier dans la création du film (Aaaah la belle époque, hélas trois fois hélas…!).

– Enfin, une troisième évolution concerne l’apport de John Cassavettes. Dans son activité de réalisation, Cassavettes viendra créer son travail de caméra en corrélation directe avec le travail de l’acteur, et même « autour » de l’acteur et de sa créativité (Ahlalala, je n’en demande pas tant mais quand même : re-la belle époque, re-hélas, 15 fois hélas…). Le corps de l’acteur devient presque le principal outil de création de l’oeuvre cinématographique au-delà même du personnage.

Sur la base de ces évolutions cinématographiques, V. Amiel se concentre sur l’évolution liée au jeu des acteurs lors de cette période. A noter qu’il s’agit donc de la génération d’acteurs qui suit la période faste de l’Actors Studio des années 40-50 et dont Marlon Brando peut être considéré comme un élément charnière. En substance, voici ce qu’il s’est passé :

– Le principal apport de l’Actors studio était un fort rapprochement entre l’acteur et son personnage. Là ou le théâtre classique imposait certains codes de jeu extérieurs et une « classification » convenue des rôles, les comédiens de l’Actors studio vont essayer davantage d’aboutir à une compréhension et un ressenti intérieur du personnage via des souvenirs personnels et autre  mémoire affective. C’est encore l’intériorité qui doit servir de pulsion et d’explications aux mouvements et actions externes.

– Puis, à cette base  va venir s’ajouter l’apport du metteur en scène Erwin Piscatore qui se traduira par une plus grande conscience de soi et de son apparence. Ce nouvel élément va fortement influencer l’enseignement du jeu proposé par l’Actors Studio. En effet, l’intérieur n’est plus seul pris en compte,une distanciation est demandée, afin d’avoir conscience de la vision donnée au spectateur extérieur à travers les gestes/poses et les codes sociétaux qui peuvent lui être imposés. L’impulsion intérieure n’est plus seule reine. Ce deuxième apprentissage est tout aussi important que celui porté par l’Actors Studio dans le travail des grands acteurs des années 70.

Tu te regardes jouer Marlon mais t’as quand même la classe (c’en est peut être même une des raisons d’ailleurs)

Bref je vous reccomande le visionnage de cette conférence passionante qui m’a permit de conforter certaines de mes interrogations quand à la façon dont nous est enseigné l’Actors Studio dans un grand nombre de stage, workshop, école…

Question personnelle : La méthode stricte de l’Actors Studio (et l’enseignement de Stanislavski) ne prend-elle pas une place trop importante au sein de certaines formations et n’est-elle pas mal enseignée ? La « Méthode » telle qu’elle est appelée, transmise par Kazan et Strasberg, semble être devenue un Saint-Graal intouchable pour nombre d’enseignants…Pourtant, contrairement à ce que nous laisse croire certaines formations, cette Méthode ne se suffit pas en elle-même et chacun selon sa sensibilité et style de jeu peut l’enrichir de ses propres envies…La Méthode est « une » méthode et c’est manquer de culture ou de réflexion de penser qu’elle suffit à avoir créer le jeu de MM. de Niro et Brando (dont Piscatore a été un enseignant)….ainsi, et à nouveau, contrairement à certaines idées reçues, des monstres du cinéma comme Nicholson, Al Pacino, De Niro avaient en plus de la Méthode une science de la « pose », de l’esthétique de leur corps en mouvement, une science de l’image….non ils n’étaient pas qu’une simple boule d’émotion…celà ne me semble pas suffisant….Et, ce n’est qu’un avis personnel, mais je suis persuadé que derrière une excellente maîtrise de leur instinct, émotions, naturel, une part de leur cerveau restait disponible pour ajouter un esthétisme extérieur allant de part ce fait à contre-courant (ou plutôt, selon moi, en complémentarité) des enseignements stricts de l’Actors Studio.

Ainsi certains enseignements ayant donné la toute puissance à l’Actors Studio jusqu’au point de mettre de côté d’autres enseignements tout aussi intéressants tels que ceux de Piscatore…nous ont pondu des petits comédiens fiers d’eux d’avoir lâché une petite larme « ressentie » mais dont la molesse du corps et le manque de présence dans l’espace ne satisfera en rien le spectateur (voire même l’agacera)… Je ne dis pas qu’ils n’ont pas le droit de jouer ainsi (je suis pour tous les styles de jeu), j’affirme seulement qu’il serait bien que les « enseignants » proposent d’apporter un enseignement qui ne se limite pas à celui de l’Actors Studio et qu’il n’y a pas a crier à l’hérésie lorsque que l’on parle de se regarder jouer. Seulement, tout cela ne doit pas se faire nimporte comment, cela doit être appris, transmis, « se regarder jouer » doit être fait avec science et talent…L’Actors Studio est une super méthode avec de superbes techniques…mais ce n’est qu’une des bases, il en existe tant d’autres à travailler !! Parce que sur scène, une limace qui pleure, moi, ça m’épuise.

http://cd1.dibujos.net/dibujos/pintados/201215/caracol-3-animales-bosque-pintado-por-deni_21313-9732268.jpg
Toute ressemblances avec des comédiens de votre entourage serait purement fortuite (mais pas étonnante)
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