Que l’Art du jeu redevienne la priorité des comédiens, voici les voeux du blog Au Petit Comédien pour 2017. Cependant, ce souhait ainsi édicté se connote d’un sentiment de moralisation qui n’est pas l’esprit du blog. Certes, certains billets d’humeur se veulent parfois aigres; mais il s’agit alors davantage de coups de plume impulsifs nés d’une mauvaise humeur passagère que d’une volonté paternaliste à vous montrer la voie. Ces voeux je ne vais donc pas vous les souhaiter à vous, mais me les souhaiter à moi, petit comédien.
En revanche, je peux effectivement vous expliquer ce qui m’amène à ME souhaiter “Que l’Art du jeu revienne au coeur de l’activité des comédiens”. Ah oui ! Là on est dans l’esprit du blog : le partage de ressentis et de réflexions… je vous invite à picorer si il y a du grain pour vous, ni plus ni moins.
On entend souvent dire que jouer est un Art; que les comédiens sont des artistes. Je veux bien y croire, volontiers. Pourtant, quelque chose m’a toujours chiffonné… Un musicien, même s’il ne peut se produire en concert trouvera du bonheur à jouer simplement chez lui, pour lui. Un peintre, même si il ne trouve pas de possibilité d’exposer, trouvera du plaisir à peindre dans son petit atelier, voir dans son garage, pour lui, pour le simple fait d’exercer son art. Ces artistes, très certainement, peuvent rêver de partager leur travail au public MAIS si celà ne devait jamais arriver ils auraient malgré tout pris le temps de se retrouver seuls avec leur art et d’en jouir, et de le faire progresser, et de s’installer dans une histoire concrète, personnelle avec lui.
Si on aime faire du piano, on en fait pour soi; si on aime peindre on peut créer ses propres tableaux… Si on est artiste donc, on doit pouvoir prendre le temps de construire son art propre, de se retrouver avec lui, que celui-ci soit destiné à être partagé ou non. Prendre le temps de rencontrer son art s’effectue certes en l’exerçant mais également en prenant le temps de découvrir celui des autres (qu’il s’agisse d’un art similaire ou différent), en s’interrogeant sur la portée que l’on souhaite lui donner (mon art se doit-il d’être engagé ? Libre ? Inutile ?…), quel est son rapport au monde ? À l’intime ?…
Agents ou non, directeurs de casting ou non, propositions de films ou non, si vraiment je suis un artiste, si vraiment mon jeu est un art alors je dois pouvoir passer une vie entière à pouvoir l’enrichir par moi-même en ayant conscience qu’il peut ne jamais rencontrer la lumière du public. Si vraiment être comédien c’est être un artiste, alors je dois aimer mon art, ou en tout cas lui apporter de l’attention. Et pour ce faire, il n’y a qu’une seule solution : prendre du temps pour se retrouver lui et moi, seul à seul. Je ne veux pas jouer ou répéter uniquement pour un tournage, je ne veux pas jouer ou répéter uniquement dans le cadre d’une formation. Je veux jouer pour moi tout seul, ne serait ce que 15mn dans ma journée, dans le fond de ma cave, à créer mes personnages, à y prendre du plaisir, à les nourrir, à me vider l’esprit d’une longue journée, seul, avec mon art. Comme un pianiste face à son piano, comme un peintre heureux d’être coincé entre pinceaux et tableau. Je me souhaite donc d’encrer l’Art du jeu au coeur de mes priorités de comédien, que la lumière vienne ou non.
Bonne année !!
PS : L’image d’illustration n’a pas grand chose à voir avec l’article je le concède… mais j’avais vraiment envie que Ragnar se joigne à moi pour nos vœux 2017.